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Lifestyle & Spiritualité

S’installer comme prof de yoga

Qu’en est-il de la réalité de l’enseignement sur le terrain ? Quel statut choisir ? Où enseigner ? Combien se faire payer pour un cours collectif ? Un cours particulier ? Combien donner de cours par semaine ?

Par Esprit Yoga

Les statuts

C’est la première question à se poser. Sous quel cadre légal juridique et fiscal, vais-je enseigner ? Ou sous plutôt sous quels cadres légales vais-je enseigner ? Il n’est pas rare en effet qu’un même professeur de yoga enseigne sous plusieurs statuts.

Vous êtes salariés avec les avantages du salariat, votre protection sociale et votre retraite est à la charge de votre employeur. Depuis le 1er janvier de cette année, les associations se trouvent dans l’obligation d’appliquer la loi de sécurisation sur l’emploi. Cette dernière impose un seuil minimal de 24 heures par semaine de temps de salariat à temps partiel. Il est désormais possible d’obtenir des dérogations tant il est impossible d’imposer un tel régime quand un professeur ne dispense que quelques heures par semaine dans une structure. Il n’empêche que cette mesure, censée protéger des abus d’emplois à temps partiel, pousse les associations à inciter leurs intervenants, auparavant salariés, à opter pour le statut d’auto-entrepreneur.

Assez facilement et simplement, il est désormais possible de choisir ce statut et de faire ses déclarations sur le site internet de l’auto-entreprise. Il est néanmoins indispensable d’augmenter le prix de ses cours puisque les cotisations à la retraite et à la sécurité sociale sont à votre charge. Travailleur indépendant ou profession libérale. Vous êtes soumis à la TVA. Vous devez donc réfléchir à votre tarification. L’avantage par rapport à l’auto-entrepreneur est que vous pouvez déduire vos charges : location de salle, frais de déplacement, matériel, livres etc…

Le statut est ici celui d’entrepreneur-salarié. Vous développez votre activité en cherchant vos élèves. Vous reversez l’ensemble de vos revenus à la Scop, vous payez des frais de fonctionnement, la TVA, les cotisations sociales salariales et patronales.

Après avoir constitué une clientèle importante, certains passent le pas et crée leur société. C’est le cas de Vanessa Brouillet qui a ouvert deux centres, un à Marseille, un à Aix. « J’ai connu tous les statuts, associatifs, auto-entrepreneur avant de créer notre lieu « Yama ». J’ai dû augmenter les prix, choisir une salle dédiée au yoga. Nous sommes ouverts 12 mois/ an, sept jours sur sept et une quinzaine de profs interviennent dans le centre. Les élèves sont au rendez-vous mais l’équilibre des comptes est fragile ».

Une fois que la question des statuts a bien été comprise, les choix d’installation se posent. Et tous les cas de figure existent. Certains professeurs, encore en formation, se retrouvent à « récupérer » la clientèle de leur professeur de yoga en enseignant à ses côtés. D’autres démarrent dans un centre social, une maison de retraite, une école, des centres de vacances, une salle communale. Les cours particuliers sont également possibles. Et puis le désir d’ouvrir une salle peut murir.

Il semble raisonnable de commencer par proposer quelques cours le temps de se faire connaître. De ne pas forcément lâcher son métier, voire de ne pas le lâcher du tout. Et petit à petit, se dégager du temps, envisager un mi-temps professionnel pour donner de l’espace et du temps au yoga. Beaucoup d’enseignant de yoga ont une double activité. Ce qui n’est pas du tout incompatible avec l’esprit du yoga qui favorise l’ouverture, qui décuple même les capacités intérieurs, d’élargir son champs de possible et sa créativité. Et ceux qui ont ouvert une salle, sont le plus souvent passés par toutes les étapes intermédiaires avant de se lancer dans l’aventure.

« ll est bon de s’appuyer sur Viveka, le discernement, explique Isabelle Morin-Larbey, présidente de la Fédération nationale des enseignants de yoga. « Qu’elles sont mes besoins de rémunération ? Qu’est-ce que je peux faire ? Suis-je prêt à donner des cours en soirée ? A me déplacer et jusqu’où ? A accepter au départ d’avoir parfois très peu d’élève ? » . Brigitte Neveux, présidente de la Fédération Française de Hatha yoga confirme la nécessité du questionnement notamment sur les besoins de rémunération, de la situation familiale « pour ne pas dénaturer l’enseignement et pouvoir le transmettre dans la joie ? » La qualité de l’enseignement peut-elle souffrir s’il est nécessaire de multiplier les cours pour tenter d’atteindre l’équivalent d’un smic tous les mois ?

La rémunération, le prix varie énormément que l’on s’installe en province ou à Paris. Le prix du foncier à Paris contraint les professeurs à fixer des prix en conséquence. Mais en province ou à la campagne, il est bon également d’envisager les frais de transport qui sont loin d’être négligeables. Il est évident qu’un cours proposé dans une MJC où vous ne payez pas la salle et où vous êtes salariés ne sera pas du même montant si vous louez une salle à Paris et que vous êtes travailleur indépendant. La première chose à faire avant de vous installer et de vous renseigner sur les prix pratiqués autour de vous. Il n’est pas juste, d’un point de vue éthique, de casser les prix et de rafler les élèves des professeurs autour de vous. Cette question est abordée abondamment dans le code de déontologie de la Fédération française des enseignants de yoga. Un professeur formé dans une école reconnue dans laquelle il s’est engagé parfois pendant 4 ans, qu’il a payé cher, ne doit pas brader son enseignement. Patrick Tomatis, directeur du syndicat national des professeurs de yoga (SNPY) se souvient de son professeur Nil Hahoutoff : « Il nous a engagé, en tant qu’enseignant débutant, à pratiquer les mêmes prix que lui. C’était le plus beau des cadeaux ». Multiplier également les choix d’abonnement est une bonne façon de permettre à chaque élève de trouver chaussure à son pied. Des cartes de dix cours, un abonnement au trimestre, à l’année…

Vous devez souscrire une assurance responsabilité civile professionnelle qui vous couvrira en cas de blessures d’un élève pendant un cours. Si vous êtes professeur affilié à une fédération d’enseignants de yoga, vous pouvez vous affilier à l’assurance de la fédération.

Le savoir-faire administratif indispensable à acquérir s’accompagne également de la nécessité de s’occuper de sa communication. Se faire connaître peut passer par la création d’un site internet mais aussi par les réseaux sociaux comme Facebook. Mais la bonne petite affichette accrochée chez la boulangère ou le marchand de journaux marche aussi très bien pour jouer la carte de la proximité. En ville, la vitrine internet est indispensable tant la concurrence est rude et les jeunes cadres urbains dynamiques connectés en permanence. A la campagne, la proximité, le bouche à oreille fonctionne bien, mais ne pas négliger non plus le site internet, qui permet de bien se présenter. Si vous êtes affiliés à une salle, il est parfois intéressant de bénéficier d’une communication déjà rodée. Dans tous les cas, cette partie est importante, elle prend du temps, surtout au début. Conserver la flamme. « L’important est de rester heureux d’aller donner son cours, assure Isabelle Morin-Larbey. Il s’agit donc d’un équilibre subtile à trouver afin de ne pas épuiser la flamme intérieure, ce qui peut être douloureux pour l’enseignant et l’élève ». Garder un appui dans la vie professionnel dans un premier temps peut être garant de la liberté de transmettre un enseignement de qualité. « Et cette joie de la transmission n’est pas mécanique » assure Isabelle Morin-Larbey. Or, en France, le yoga est encore considéré comme une activité de loisir qui a longtemps été subventionné, donc peu cher pour les élèves. Nous sommes prêts à payer 150 euros les conseils d’un avocat mais sans doute pas un cours de yoga, à l’exception de cours particuliers dispensés à des people mais qui ne concerne qu’une minorité de professeurs. De plus, les écoles forment de nombreux professeurs chaque année. On peut raisonnablement se poser la question d’un écrémage dans les années à venir, vu la diversité des enseignements et parfois les dérives. Trop de yoga peut tuer le yoga… Il est également utile d’observer attentivement ce qui se pratique Outre-Atlantique et qui ne tarde jamais à se produire en Europe plus tard : des investisseurs s’engagent dans la création de salle où sont dispensées différentes formes de yoga. Les professeurs sont salariés, dans de bonnes ou mauvaises conditions. Le yoga est alors au cœur d’un business qui rapporte. Un nouvel outil de marketing. Qu’en restera-t-il de l’enseignant et de l’enseignement ?

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